Un Engrenage fatal L’UGIF face aux réalités de la Shoah, 1941-1944
Depuis le déclenchement de la Shoah jusqu’au procès Papon, un certain nombre de dirigeants juifs français ont été stigmatisés comme «Juifs collaborateurs», aussi bien par une partie de la presse résistante clandestine, que par une historiographie polémique récupérée par les négationnistes. Ces dirigeants furent membres de l’UGIF entre 1942 et 1944. L’Union générale des israélites de France a été créée, sur injonction des Allemands, par une loi du gouvernement de Vichy de 1941. Il s’agissait de délimiter les contours de la communauté juive «unifiée» que des décennies d’assimilation républicaine avaient rendue insaisissable et de la retrancher définitivement de la société civile française. Confrontés aux procédures de spoliation et de paupérisation de leurs communautés, certains dirigeants juifs ont accepté de négocier leur entrée dans l’UGIF, en échange de la sauvegarde des organisations juives d’assistance. L’objet de ce livre est de déterminer la part de l’UGIF dans les stratégies de sauvegarde, mais aussi d’aveuglement, voire de persécution des communautés juives de France. Les rafles dans les maisons d’enfants de l’UGIF en région parisienne, à la fin du mois de juillet 1944, pèsent lourd sur la responsabilité présumée de certaines élites. Ces maisons d’enfants, écoles de formation, asiles, dispensaires et cantines ont-ils été des lieux permettant le repérage, voire l’internement de communautés traquées? L’UGIF a-t-elle été un rouage du système des déportations, notamment à travers l’approvisionnement du camp de Drancy?
À propos
«Légende rose, légende noire? Je pense plutôt, comme Michel Laffitte, à une "zone grise", selon l’expression de Primo Levi, voire à une "zone crépusculaire". Une vaste zone grise, d’où se détachent un petit nombre de traîtres, mais aussi quelques héros… A défaut de juger, il faut écrire l’histoire. Que ressort-il finalement de ce fantastique amoncellement de papier? Un drame qui nous poursuit encore dans nos mémoires, mais aussi l’œuvre d’un historien qui a su tenir les deux bouts de la chaîne, qui a compris qu’il fallait s’intéresser à la fois aux individus et aux collectivités, réelles ou imaginaires.» Pierre Vidal-Naquet